Crédits  Pierre Grosbois

Crédits Pierre Grosbois

Eloquent, Emouvant, Poignant.

Marguerite Duras, 1914-1996 , s’est inspirée d’un fait divers surprenant arrivé dans  les années 50. La première version fut une pièce de théâtre crée et jouée en 1960 :Viaduc de seine et Oise. La deuxième fut tout d’abord le roman L’amante anglaise en 1967, puis une pièce de théâtre créée avec Madeleine Renaud en 1968, le texte a été révisé au gré des reprises du metteur en scène Claude Régy jusqu'à la version définitive (1991).

© DR

Le fait divers : Amélie Rabilloux a tué son époux un soir de 1949 à Savigny/ Orge. Pendant trois jours, seule, avec une hache et un couteau de boucher, elle se mit à découper le cadavre encombrant qu’elle jeta dans les champs et dans les égouts. Lors de son arrestation, elle avoua son crime. Après 5 ans en maison de détention, elle fut libérée.

«Je les ai appelés les Lannes, Claire Lannes et  Pierre Lannes. J'ai changé aussi la victime du crime; elle est devenue Marie-Thérèse Bousquet, la cousine germaine de Pierre Lannes, celle qui tient la maison des Lannes à Viorne. » Marguerite Duras.

Crime à Viorne : Claire Lannes est une femme un peu hors du monde,  vivant dans ses souvenirs, elle aime particulièrement la menthe anglaise qui  pousse et fleurit dans son jardin. Elle vient d’avouer avoir tué et dépecé sa cousine Marie-Thérèse sourde et muette. La police a retrouvé les débris humains dans différentes gare de France, sauf la tête.

Crédits Pierre Grosbois

Il n’y a pas grand mystère, la coupable et la victime sont connues. Mais des questions se posent: qui est  Claire Lannes?  Pourquoi a-t-elle tué Marie-Thérèse? Où est la tête? Où le crime a-t-il été commis, dans la cave, dans les bois? Aurait elle pu tuer un autre individu que sa cousine? Pourquoi les débris humains se retrouvent ils dans différentes gares de France?

Un homme non policier, mi psychologue, mi enquêteur,  joué par Frédéric Leidgens avec talent, va essayer  de comprendre la personnalité de l'accusée en procédant à deux interrogatoires: celui de Pierre Lannes interprété avec justesse par Grégoire Oestermann, puis celui de Claire Lannes incarnée avec brio par Sandrine Bonnaire

« L’interrogateur : Pourquoi l’avez-vous tuée ? / Claire : Si j’avais su le dire, vous ne seriez pas là à m’interroger. Pour le reste je sais. / I :  Le reste  / C: Si je l’ai découpée en morceaux et que j’ai jeté ces morceaux dans des trains, c’est que c’était un moyen de la faire disparaître, mettez vous à ma place, quoi faire ? ».

Cet homme n'est point dans le  jugement de  l’acte de Claire, il veut  simplement voir plus clair en cette femme.

« Je ne suis pas là pour vous interroger sur les faits, comme vous le savez, mais sur le fond ».

A travers ces interrogatoires, nous découvrons les personnalités de Pierre, de Claire, de Marie-Thérèse, ainsi que  les hommes qui furent importants pour Claire : l’agent de Cahors et Alfonsi.

Crédits Pierre Grosbois

La mise en scène de Jacques Osinski est orchestrée avec une extrême minutie, l’intrication des mots et du silence intensifie les émotions et la profondeur du texte de Marguerite Duras. Jacques Osinski dirige au cordeau ces magnifiques comédiens,  nous sommes captivés par ce drame hors du commun.
La scénographie d'une grande sobriété, donne une belle  ampleur au  texte et au jeu des acteurs .

Sur l’avant-scène devant le rideau de fer ocre, vient s’assoir Pierre ,’Grégoire Oestermann ‘, posé, calme, élégant, déconcerté par l’acte de Claire, il répond avec franchise et sans jugement aux questions parfois surprenantes et indiscrètes de ce psychologue enquêteur. Grégoire Oestermann  nous émeut et nous enchante par la justesse et l’authenticité de son jeu.

Frédéric Leidgens, incarne avec talent un captivant intervieweur,  il se tient au milieu de public, il cherche à comprendre l’incompréhensible,  sa parole est insistante et sans détour. 

Crédits Pierre Grosbois

Au deuxième acte, le rideau se lève sur  le plateau dénudé du théâtre,  Claire, ‘Sandrine Bonnaire’, fragile, dans une petite robe noire, s’avance et vient s’ assoir  sur le devant  de scène. Elle répond stoïque, sans émotions, parfois avec un air enfantin puis   par instant  son sourire éclaire son visage. Sandrine Bonnaire est bouleversante perdue dans son monde, ses souvenirs et  sa folie.

‘En écrivant L’Amante anglaise, c’est l’âme humaine que Duras replace au centre du théâtre. À travers le personnage de Claire Lannes, elle nous permet d'entrer dans une zone d'inconfort qui éclaire la folie.’ Jacques Osinski

Claudine Arrazat

Texte publié aux Éditions Gallimard

Lumières Catherine Verheyde / Costumes Hélène Kritikos  / Dramaturgie Marie Potonet

Création le 19 octobre 2024 au Théâtre de l’Atelier

Production : Théâtre de l’Atelier – Compagnie L’Aurore Boréale /  Coproduction : Théâtre Montansier/Versailles – Châteauvallon-Liberté,scène nationale / La Compagnie L’Aurore boréale est conventionnée par la DRAC-Ile de France

AU THÉÂTRE DE L'ATELIER 1place Charles Dullin - Paris 18e  Du 19 octobre au 31 décembre 2024   21h du mardi au samedi – 15h le dimanche  Durée : 2h10

TOURNÉE9 au 11 janvier 2025 au Théâtre Montansier (Versailles) / 14 janvier 2025 au TAP Poitiers avec les ATP / 16 & 17 janvier 2025 à Toulon (Châteauvallon-Liberté scène nationale)8 février 2025 aux Franciscaines (Deauville)

Tag(s) : #TH de L'Atelier, #Critiques

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