Puissant, Éloquent, Réjouissant
En 1944 Tennessee Williams 1911-1983 devint subitement célèbre en transformant un scenario refusé par la MGM , en pièce. « La ménagerie de verre ».
Ivo van Hove nous offre une mise en scène puissante et éloquente qui nous émeut et nous enchante.
En 1944 Tom, alter égo de Tennessee Williams, va nous conter ses souvenirs des années 1930 vécues entre sa mère Amanda et sa sœur Laura, tous trois abandonnés par le père parti pour vivre ses rêves.
Tom, nous accueille en bord de scène, nous amuse d’un petit tour de magie puis renverse le cours du temps.
*Je vous offre la vérité affublée du masque plaisant de l’illusion.
Les rideaux s’ouvrent et apparait un appartement modeste, sobre et situé en sous-sol. IL est relié au monde extérieur par un petit escalier escarpé. L’image du père absent hante les murs revêtus de chaux ocre. Une atmosphère un peu suffocante règne dans ce refuge.
Amanda, Isabelle Huppert, s’affaire avec fougue dans sa cuisine. Elle vit dans le souvenir de ses années de gloire et de jeunesse pour oublier son infortune et se démène avec énergie pour le bonheur de ses enfants.
Laura, Justine Bachelet recroquevillée près de son électrophone a peur du monde, elle demeure à l’image de sa collection de petits animaux en verre « sa ménagerie de verre » fragile et délicate.
Antoine Reinartz incarne avec brio Tom, il travaille à l’entrepôt pour soutenir sa famille, mais il rêve de partir vivre sa vie en toute liberté. Il se gave de cinéma. Que cache-t-il derrière ce hobby ? Tom est mystérieux sur sa vie privée.
*j’en ai assez du cinéma, de regarder les autres partir. Je veux partir moi aussi.
Tous trois vivent en vase clos mais un jour la rencontre d’un ami d’enfance Jim, interprété avec brio et charisme par Cyril Gueï va secouer ce petit monde.
Les sortira- t- il de leur torpeur ?
Jim apprivoise Laura dans une magnifique scénette à la lueur des bougies, c’est transperçant, émouvant et percutant.
*Vous croyez être la seule à avoir des préoccupations de ce genre…
*Être désillusionné est une chose, être découragé en est une autre.
Laura va-t-elle s’identifier à sa petite licorne qui a perdu sa corne malencontreusement ?
*Maintenant il se sentira à l’aise avec les autres chevaux, ceux qui n’ont pas de cornes.
Cette pièce évoque la fragilité des êtres, leurs frustrations, leurs malaises mais est pleine d’espoir, l’espoir de se construire, de s’accepter et de s’accrocher à ses rêves et de vivre.
La scénographie, la lumière nuancée, les clairs obscures de Jan Versweyveld ainsi que le son, la musique originale de Georges Dhauw intensifient les émotions.
La mise en scène d’Ivo van Hove orchestrée avec vigueur, vitalité et justesse, nous entraine dans un huis-clos poignant et bouleversant. « Une ménagerie de verre » dont on se souviendra longtemps.
Justine Bachelet nous réjouit et nous chavire par sa gestuelle, ses expressions, la chaude tonalité de sa voix et son talent.
Isabelle Huppert est excellente, elle se donne sans limite dans le rôle de cette mère exubérante, directive et souhaitant un avenir heureux sa progéniture.
Antoine Reinartz et Cyril Gueï nous captivent par la sincérité de leurs jeux.
Bravo pour ce magnifique moment de théâtre.
Claudine Arrazat
Traduction française : Isabelle Famchon / dramaturgie : Koen Tachelet / scénographie, lumière : Jan Versweyveld / costumes : An D’Huys / son et musique : Georges Dhauw
Production Odéon-Théâtre de l’Europe coproduction Onassis Stegi – Athènes, La Comédie de Clermont-Ferrand scène nationale, deSingel – Anvers, Barbican – Londres La Ménagerie de verre est présentée en vertu d’un accord exceptionnel avec The University of the South, Sewanee, Tennessee la pièce est gérée en Europe francophone par Marie-Cécile Renauld, MCR Agence Littéraire en accord avec Casarotto Ramsay Ltd
durée 2h 25 novembre – 22 décembre - Odéon 6e